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Expertise

GOOGLE, SEUL GRAND MAITRE DE L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE ?

By 1 avril 2016 mai 22nd, 2017 No Comments

La victoire d’Alphago, sacré « grand maître de go » est désormais actée et indiscutable.

L’intelligence artificielle de  Google l’a emporté 4 manches à 1 sur le joueur Lee SEDOL, classé troisième mondial, pourtant considéré comme le meilleur joueur au monde.

Mais revenons sur l’engouement que cette partie de go a suscité, et sur les stratégies industrielles et de recherche qui se trament en arrière-plan.
Pourquoi cette partie de jeu de go a-t-elle autant captivé le public occidental, d’ordinaire indifférent à cette discipline ?

Parce qu’on y célèbre l’Intelligence Artificielle (IA), et que le mythe de l’homme dompté par sa propre créature ressurgit, laissant à nouveau planer l’ombre du monstre  de Frankenstein.
A l’époque, il s’agissait d’un personnage de roman, d’une pure fiction.
Cette fois la créature existe, elle s’appelle AlphaGO, et ses faits et tactiques ont été abondamment commentés et savamment orchestrés par Google.

En 1997, on avait connu les premiers frissons lorsque DeepBlue, l’ordinateur d’ IBM, avait battu Kasparov, champion du monde d’échecs.
On avait alors commencé à imaginer des machines prenant le pouvoir sur les humains. Pourtant, les scientifiques nous rassuraient en ramenant DeepBlue à un supercalculateur, connaissant toutes les combinaisons possibles, mais totalement dépourvu d’intelligence.

Aujourd’hui, avec AlphaGO, on le prétend intelligent, plus proche de l’homme, car capable de reproduire l’intuition, d’apprendre de ses erreurs.
Une description suffisante pour relancer la machine à fantasmes, et cristalliser les débats sur l’IA… mais ce serait là l’objet d’un autre article.

Google au travers de sa filiale Deepmind aurait donc pour ambition de devenir le champion absolu de jeu de GO grâce à sa « créature » ?
Pourquoi ? Par amour du go ? Peut-être, mais surtout  pour l’effet d’annonce à l’échelle de la planète et le prestige associé au rang de « grand maître de go », obtenu grâce à cette victoire, dans la sphère économique asiatique.
Mais l’enjeu est au-delà. Ce qui intéresse Google, c’est la suprématie en matière d’intelligence artificielle.
Pourquoi cette effervescence autour de l’Intelligence Artificielle ?

Les plus grands des nouvelles technologies et de l’informatique dépensent des milliards en recherche et en achat de start up : en 2014, Google l’a emporté sur Facebook lors des négociations pour le rachat de DeepMind, qui développe AlphaGo pour un montant évalué entre 400 et 500 millions de dollars
Quels sont, pour eux, les enjeux de l’IA ?
Le rêve ultime de tous ces acteurs, c’est d’être capable de reproduire le plus fidèlement possible le fonctionnement du cerveau.

Dans leur modèle économique, l’un comme l’autre mise énormément sur la reconnaissance d’images, et la compréhension de contenus : les 2 combinés pourraient leur permettre de comprendre dans quel contexte nous évoluons, où nous allons, ce que nous faisons, ce que nous planifions. Ces informations leur permettraient en effet de cibler nos envies, et nos habitudes et de nous proposer des services marketing en adéquation parfaite avec nos goûts.

Pour Google, le jeu de go n’est qu’un cheval de Troie, très médiatique, pour renforcer son image, et attirer des talents.
A coup sûr,  la victoire emblématique d’AlphaGo marquera les esprits comme celle de DeepBlue d’IBM en 1997.
Les ambitions marketing doivent être intégrées dans la stratégie de Google, mais il ne faut pas perdre de vue non plus les avancées scientifiques et technologiques qui ont permis le succès d’Alphago. Ce qui les a amenés à devenir ce champion de Go, ce sont les énormes efforts que Google déploie en matière de d’IA, et tout particulièrement de Deep Learning.

Le domaine phare de l’IA: le Deep Learning, et les « parties » en cours

Les fondements de la théorie du Deep Learning ont été posés dès les années 80, sous la forme des premiers réseaux de neurones. Pourtant pour développer toute son efficacité,  il a fallu attendre que les moyens disponibles progressent.
Désormais, la puissance des ordinateurs et le volume des données lui permettent de faire la démonstration de sa valeur.

Quand on analyse les données objectives fournies par les bases mondiales de brevets, on constate que le secteur de l’IA est en plein essor et focalise une grande part des efforts développés en matière d’IA.
En 2006, 23% des brevets rattachés à l’IA, concernaient le Deep Learning .
en 2014, 39%.
Progression en pourcentage du domaine, mais aussi en valeur absolue :
entre 2008 et 2011, on observait en moyenne un peu moins de 70 dépôts de brevets par an se référant et à l’IA et au Deep Learning.
En 2014, l’activité a doublé : 151 brevets ont été déposés, et les tendances connues pour 2015 laissent augurer que le cap des 200 pourrait être largement atteint.

On observe des situations très contrastées si l’on étudie plus précisément le positionnement en matière d’IA et de Deep learning de 3 acteurs qui ont communiqué abondamment pendant ce dernier affrontement homme/machine : Google, Facebook et IBM.

Que nous enseignent les dépôts de brevets sur les 10 dernières années ?

   IBM, 400 dépôts, très réguliers tout au long de la période,
   Google 304, essentiellement depuis 2011
   Facebook 75, presque exclusivement à partir de 2011.

   L’écart est plus marqué encore si l’on se concentre sur les publications scientifiques produites :

   1098 pour IBM,
539 pour Google et
55 pour Facebook
.

On peut imaginer que l’intégration au sein de Facebook en 2013 de Yann Le Cun, considéré comme l’un des inventeurs  du Deep Learning , et toujours l’un des chercheurs les plus influents du domaine, selon ses pairs, répond à la volonté de « recoller » au peloton et d’obtenir des résultats probants.

Curieusement, durant cette affrontement médiatique autour des jeux de stratégie, on aura noté un grand absent : Microsoft pourtant champion toutes catégories avec 616 brevets ces 10 dernières années.

C’est vraisemblablement que la mise en scène médiatique et grand public que Microsoft a choisie est située dans un  autre domaine : le jeu vidéo, avec son projet AIX (Artificial Intelligence eXperimentation).
Une intelligence artificielle est « lâchée » dans Minecraft et doit apprendre à s’y déplacer.
Ce terrain du jeu vidéo sera d’ailleurs sans doute le prochain terrain d’affrontement médiatisé des développeurs d’IA, de Microsoft et de Google, car Deepmind, grand maître du go, devrait prochainement commencer à jouer au jeu vidéo Starcraft.

Certes, Google peut s’enorgueillir de son titre de grand maître du go, mais la partie court encore et les joueurs sont nombreux à tenter d’acquérir le statut de champion de l’Intelligence Artificielle.

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